pilar n'a pas compris. ou si justement. et elle n'est pas au courant ! ça la dérange passablement... elle peste depuis dix bonnes minutes déjà, à la recherche d'une silhouette qu'elle a déjà croisé hier non loin de son petit frère. qu'est-ce qu'il se passe au juste hein ? il aurait une copine qu'elle ne connait pas ? parce que pilar connait tout le temps les copines de ses frères. elle sait tout, malgré eux la plupart du temps. quelle ne fut pas sa surprise de retrouver son frère en belle compagnie sans même qu'elle ne soit au courant. elle frappe sur son téléphone alors qu'il l'empêche de téléphoner à la personne qui devait s'occuper de la musique ce soir. décommandé, à la dernière minute... elle n'arrive pas à croire que c'est en train de lui arriver, elle qui prévoit toujours tout à l'avance. ce professionnalisme mit si facilement, elle n'en revient pas. c'est au moment où la personne au bout du fil répond que la silhouette de la brune se dessine non loin d'elle. un coup d'oeil à gauche, puis à droite, elle traverse la rue en insultant l'ancien dj à qui elle promet de longues années d'errance puisqu'elle fera tout son possible pour ruiner sa réputation avant qu'il n'ait pu travailler sur l'anniversaire d'un autre maire local. elle n'en a que faire pilar, elle travaille avec des personnalités une douzaine de fois plus importantes... elle tire sur le bras de lola tout à coup, l'ayant rattrapée au passage, continuant sa conversation en insultant une énième fois le mâle à l'autre bout du fil, lui qui tentait vainement de régler les problèmes imposés à pilar. elle n'a besoin de personne pilar... elle saura faire ce qu'il faut, elle aurait juste aimé ne pas avoir à courir toute la journée à cause de l'incompétence chronique de ces musiciens bons marchés. elle raccroche et porte enfin son regard sur lola qu'elle ne connait pas mais qu'elle a arrêté depuis déjà trente bonnes secondes. t'es qui toi ? elle demande sans grande politesse. après tout, c'est elle qui l'a importuné mais... elle ne semble pas le prendre de cette manière, comme si tout le monde devait la connaître, surtout les personnes qui s'approchent un peu trop près de joao ou leos, à l'évidence...

De jour, Lola tente de prendre ses repères dans Séville. Ses nuits, elles sont occupées par les activités les plus dégradantes qui soient. Ces activités dont elle ne parle pas, à personne. Elle tente de s'éloigner de cette personne qu'elle est contrainte d'être, pour retrouver un peu celle qu'elle était. Elle était appréciée, avant. Connue de tout son village. Aujourd'hui, elle n'est plus qu'un nombre dans la masse, une étrangère qui a bien du mal à s'intégrer. La culture, si différente de la sienne. La langue, qui n'a rien en commun non plus avec les deux qu'elle parle depuis sa plus tendre enfance. Elle aimerait bien tomber sur quelqu'un de son pays, au moins pour se sentir moins seule. Moins perdue... Avoir quelqu'un à qui demander conseil. Plus tard peut-être. Elle marche encore, regarde autour d'elle tout en essayant de saisir des mots qu'elle pourrait apprendre. Finalement, on la rattrape... On attrape son bras, et elle tire dessus pour qu'on la lâche. On ? Une fille. Une blonde sortie de nulle part. La femme d'un de ses clients ? Elle ne voit que ça. Mais elle semble bien trop délurée pour être mariée, ou à défaut, dans une relation sérieuse. Lola la regarde sans comprendre ce qu'elle lui veut, avant qu'elle ne s'entende demander qui elle est.  Elle n'aime pas l'approche, trop brutale à son goût. Et elle se braque, récupérant enfin son bras. Elle la regarde avec insistance, un air méfiant sur le visage. Qui elle est ? En quoi ça la concerne au juste ? À moins qu'elle ne soit de ces femmes cocues, dont les compagnons sont assez désespérés pour aller voir une prostituée, elle ne voit pas. « T'es qui toi ? » demande-t-elle en retour, en appuyant sur ce dernier mot. Elle n'a pas à répondre, elle. Elle n'est pas venue la chercher... Elle ne serait jamais venue, elle a assez d'ennuis, et elle ne la connaît pas non plus. Puis elle compte bien se protéger aussi. Sa survie avant tout. Sans savoir pourquoi, elle se met à penser au jeune homme qui l'aide avec ses papiers, pour lui donner une vie meilleure... Elle taira son nom, pour ne pas lui causer d'ennuis. Il la protège, dans un sens, et elle lui doit bien de faire pareil.

elle ne devrait sans doute pas pilar, elle s'occupe trop facilement de la vie de ses frères. elle sait qu'il sera en colère, surtout leos... il n'aime pas beaucoup attirer l'attention, encore moins qu'elle s'occupe de lui. un garçon qui solitaire à son goût. qu'il le veuille ou non, elle est là, elle sera toujours, parce que leurs parents les ont choisi tous les deux alors qu'ils étaient chacun perdus à un avenir différent, dans des familles qui ne pouvaient pas se permettre de les garder. pilar veut le meilleur pour eux deux, elle pense à joao, celui dont elle est le plus proche, elle fait toujours ça pour lui... il est temps qu'elle commence pour leos. alors cette fille, elle la regarde avec des yeux noirs, parce qu'elle lui paraît être assez menaçante dans l'équilibre de sa famille pour qu'elle s'en mêle. pilar attend, elle est certaine qu'il y a quelque chose qui se cache derrière ces yeux de biche qui se veulent tout à fait innocents. elle n'est pas née de la dernière pluie.. et ne se laisse, à coup sûr, jamais avoir par quelques jolies intentions. c'est bien pour cette raison qu'elle pense être le cerveau de la famille, parce qu'elle est la seule à savoir comment appréhender les choses sans penser avec ce qu'elle a entre les jambes, quelque chose que ses frères ne pourront jamais faire... t'es qui toi ? elle ose avec un air qui ne plait pas du tout à pilar... pilar croise les bras sur sa poitrine, leos ne lui a pas parler d'elle ? pourquoi ne parle-t-il jamais d'elle ? il faudrait qu'elle lui en touche deux mots un de ces jours. certaine qu'il n'en aura sans doute rien à faire, comme d'habitude. je suis pilar núñez, la soeur de leos. elle dit avec autant d'arrogance dont elle est capable. c'est bien suffisant et ça lui ressemble à la perfection. son frère mérite mieux que ça. elle n'est même pas si jolie, quand elle la regarde de plus près. ou c'est la jalousie qui parle ? deuxième chance, t'es qui ? elle demande à nouveau, parce qu'elle n'en aura pas de troisième avant qu'elle ne se mette à crier et faire un caprice comme elle sait si bien le faire. après tout, pilar ne donne jamais de deuxième chance à personne, elle devrait se trouver privilégiée par sa patience.

Lola s'accorde un moment, un de ceux que les personnes normales ont. Juste errer dans la ville, apprendre à la connaître parce qu'elle s'y perd toujours un peu. Ça n'a rien à voir avec son village, il faut dire. Et puis les gens sont différents, la langue aussi. Elle a du mal à prendre ses marques... Surtout dans ce contexte. Ce n'est pas ce qu'elle imaginait, pour sa nouvelle vie. Ce n'était pas de ça dont elle rêvait, quand elle a pris le train, puis le bateau. Comme si elle n'avait pas fait assez de sacrifices, pour arriver ici. Ça continue, elle ne s'en sort pas. Elle ne fait que penser à ses papiers, se disant qu'ils vont la sauver... Et celui qui l'aide aussi. Elle espère de toutes ses forces, ne pouvant compter que sur elle-même. Elle n'a personne, Lola. Mais alors qu'elle était tranquille... Une fille l'aborde. Elle n'aurait même pas besoin de connaître la langue pour savoir qu'elle est agressive envers elle. Pas un bonjour. Elle va droit au but comme si Lola avait quelque chose à se reprocher. Elle, elle s'imagine d'abord que c'est la petite-amie d'un client, quelque chose dans ce goût-là. Mais les clients n'ont pas intérêt que ça se sache non plus de toute façon. La fille de l'est ne va pas se laisser faire. Jamais. Elle se protège, Lola. Elle ne va pas laisser cette blonde peroxydée l'attaquer, et être docile. Elle n'est pas comme ça... Elle tient un peu de ses parents. Elle ne se soumet pas. La fille répond alors. Des noms qu'elle ne connaît pas. Elle n'en connaît aucun ici. Puis elle les trouve étranges pour la plupart. Sûrement pas familiers... Mais pas laids pour autant. « Connais pas. » dit-elle clairement. Elle n'a rien de plus à lui dire, elle. Elle veut juste qu'on la laisse tranquille. Elle reprend, la dénommée Pilar. Pas aimable. Sûrement pas espagnole malgré son nom. Elle aussi elle a le teint d'ailleurs, et elle comprend pas comment on puisse être aussi hautaine en n'étant même pas d'ici. Elle insiste, comme si elle faisait peur à Lola. Elle a connu pire, et encore aujourd'hui. Il lui en faut beaucoup... « Pas tes affaires. Salut. » lance-t-elle. Et elle se tourne, pour reprendre sa route, bien décidée à ne rien dire. Elle est butée, Lola.