Zahir. Ah, Zahir. Putain, qu’est-ce qu’elle l’aime son frère mais à l’instant même, elle aurait tendance à l’oublier. « Tu verras, ça change tout le goût ! » qu’il lui a dit. Sa bouille d’ange, elle y a eu le droit. Elle le déteste de savoir aussi bien s’y prendre. Puis, elle se déteste d’être aussi faible. A chaque fois, c’est la même chose. Elle ne sait pas dire non à son aîné. Bon, il faut dire qu’il a plutôt une belle gueule, le Zahir. Alors, la voilà sur ce chemin de terre boueux. D’ailleurs, elle ne comprend pas comment c’est possible. C’est quand la dernière fois qu’il a plu ? Sérieusement, Séville possède en micro climat ou quoi ? Dès que le panneau de la ville est passé, il faut s’attendre au pire ? Pff. La grande brunette perchée sur des chaussures à talons se retourne, regarde sa voiture garée à quelques mètres de là avec envie. Elle a clairement envie de faire demi-tour et de rentrer. Et si c’est ce que souhaitait Zahir ? Si ça se trouve, toute cette connerie n’est qu’une vulgaire blague. L’envoyer, elle, la fille de la ville en pleine campagne juste pour une bouteille ou deux d’huile d’olive. C’est ridicule. Il va l’entendre, croyez-le. Enfin, elle va essayer d’hausser le ton et de paraître crédible devant son frère mais il ne faut pas rêver, c’est peine perdue. Elle ne se souvient même pas de la dernière fois qu'elle s’est disputée avec son frère. Yuna secoue la tête, désespérée. Ah ! Elle l’aperçoit, la petite épicerie qui accompagne la ferme. Enfin, si c’est bien comme ça qu’on appelle ça ici. Différente météo, peut-être qu’il y existe une manière de parler différente aussi ? Un patois. Bref. Ça y est. Elle pénètre dans l’épicerie. Il y fait étonnement clair, trop puisqu’elle constate sans mal l’état lamentable de ses chaussures. Elle aurait dû mettre des bottes. La voilà qui peste dans sa langue maternelle. Elle le fait toujours, ça renvoie une image moins grossière. Enfin, elle croit. Yuna est littéralement sans voix devant l’étendue des produits qui s’offre à elle. Ok. Zahir n’a pas précisé ce qu’il voulait. Il a dit « huile d’olive » mais elle en voit à la pelle. Il va l’entendre le frangin. Ah ça oui !
Dernière édition par Yuna Imzilen le Lun 4 Juin - 17:13, édité 1 fois
J’aurais cru vivre une journée des plus ennuyantes, et en fait, elle l’a été jusqu’à ce moment précis. Me trouvant dans la boutique, j’en profite pour faire quelques mises à jour, réorganiser la disposition de certains produits et imaginer différents aménagements pour le futur. Je pense au progrès, je pense au après, parce que je compte bien faire tenir l’exploitation encore bien longtemps. Déterminé et optimiste, je l’ai toujours été –mais uniquement lorsque ça concerne le travail. Mon attention rivée sur les étagères, jusqu’à ce moment d’inattention. Les sourcils qui se froncent, je m’avance d’un pas, puis de deux vers la porte de la boutique. Cette silhouette qui s’avance vers moi, ou plutôt, tente d’avancer sur le chemin poussiéreux et un peu boueux. Ah, l’humidité, ce n’est pas rare d’en trouver certains jours –et surtout en début de journée. Un instant, je me demande bien si cette demoiselle va tenir le coup jusqu’ici, parce qu’elle n’a clairement pas la tenue d’une cliente habituelle. Le sourire en coin qu’elle me décroche avant même de s’être adressée à moi, avant même d’avoir franchi le pas de la porte. Elle le fait, plusieurs longues minutes après, et je me trouve quant à moi plus au fond de la pièce. Un visage fin, des lèvres pulpeuses et une chevelure d’un foncé parfait. Une jeune femme, grande, élancée, qui n’est clairement pas du pays. Je peux vous aider ? que je lui demande en la rejoignant. Je constate l’état de ses chaussures, mais c’est surtout ces fameux talons qui m’amusent. Le voyage a été rude jusqu’ici ? Oh, c’est gentillet, c’est juste pour la taquiner. Peut-être aurait-il mieux valu préciser sur un panneau que la route est cabossée, terreuse et que des bonnes chaussures sont préférables ?
Ses yeux bien vite descendus sur ses chaussures, ses belles chaussures qu’elle aime tant – comme toutes ses autres paires, d’ailleurs – Yuna ne prête plus aucune attention à ce qui se passe autour d’elle. De toute façon, elle se trouve actuellement à la campagne alors qu’est-ce qu’elle pourrait bien louper ? Pas grand-chose. Il se passe rarement quelque chose d’intéressant là-bas. En tout cas, c’est son avis mais au final, qu’en sait-elle ? Toute sa vie, elle a habité la ville. La vraie. La grande. C’est tout ce qu’elle connait et loin d’elle l’envie que cela change. « Je peux vous aider ? » Yuna sursaute. Ses yeux se lèvent pour se poser sur un homme, un parfait inconnu mais il n’y a rien de surprenant là-dedans. Tout ce qu’elle repère chez lui, c’est ses bras tatoués. Les deux. Elle ne serait pas étonnée s’il en avait d’autres. Ces trucs-là, une fois qu’on commence, c’est bien difficile de s’arrêter. Quittant la bande dessinée que ses deux bras représentent, elle reporte son attention sur son visage. S’il peut l’aider ? Il pourrait lui indiquer le chemin le plus court pour retourner à sa voiture mais avant ça, elle a une course à faire. Elle n’a tout de même pas ruiné ses pompes pour rien. « Le voyage a été rude jusqu’ici ? » Oh, il l’a remarqué et il semble bien s’en amuser le campagnard. Elle n’est pas vexée la gamine, il lui en faut plus. Au contraire, un léger sourire apparaît sur son visage. Il n’est pas énorme, faut pas trop en demander. Elle est loin d’oublier qu’elle n’est pas du tout dans sa zone de confort. « J’ai bien cru ne jamais m’en sortir. » Ce n’est pas comme si elle avait vécu dans un pays en guerre. Bref. « Mon frère m’a demandé d’acheter l’un de vos produits mais étant donné votre look, je devrais peut-être m’attendre à ce que vous me sortiez un sachet de coke de vos bottes. » Quoi ? Il veut rire ? Elle sait rire elle aussi. Pas de soucis pour ça.
Drôle de bout de femme qui se pointe dans la boutique. Elle passe la porte, avec cet air que l’on peut qualifier de « au bout de sa vie ». Je m’en amuse, car ce n’est pas tous les jours que ce genre de situation se produit. Alors je joue le vendeur, parce que c’est mon but du jour, me soucie de ma clientèle, en l’occurrence la demoiselle en détresse. Et j’avoue que sa remarque, à me qualifier ouvertement de dealer, me fait écarquiller les yeux, puis un sourire étire mes lèvres. Qui devient de plus en plus grand, parce que je ne peux pas m’en empêcher. Justement… on peut passer dans la pièce d’à côté alors… Un bref coup de tête vers la porte de l’arrière-boutique, histoire de jouer le jeu. Puis je ris, doucement, avant de croiser les bras contre mon torse. Bon, on fait que des produits à base d’olive, sans coke ni rien, ici. Toujours intéressée ? C’est bien une drôle de conversation pour une première rencontre. J’ai cette impression que la jeune femme est originale, bien plus que la majorité des gens. Son franc parler, et la malice sur son visage, tout ça me donne envie de poursuivre notre échange. Et qu’est-ce que votre frère vous a demandé de ramener exactement ? Parce que si elle ne le sait pas, je ne pourrais pas le savoir pour elle. Il y a tellement de produits sur les étagères que jouer aux devinettes conduirait à un verdict négatif. Trop de possibilités. J’suppose que vous n’êtes pas du coin, mh ? Simple supposition, peut-être pas sortie de nulle part. Son look, son comportement, la la manière dont elle parle. Je suis presque certain de sa réponse, même si je pourrais encore être très surpris par la brunette. J'attends de voir.
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